dimanche 23 juin 2024

IA génératives vs Artistes

Entre l'intelligence artificielle et les artistes, la guerre est déclarée. Les seconds accusant la première de voler leurs oeuvres au mépris de toute règle sur les droits d'auteur et de signer à très court terme leur arrêt de mort en les remplaçant à un coût défiant toute concurrence.

Si la première accusation est totalement fondée, je serais bien plus modéré concernant la seconde. Ce qui suit est donc mon avis sur cette l'IA générative et son utilisation. 

J'insiste tout d'abord sur le fait qu'il ne s'agit que d'un avis personnel. D'un côté, et bien que je produise moi-même quelques contenus pour le jeu de rôle, je n'ai nullement la prétention de me qualifier d'artiste. D'un autre côté, j'utilise l'IA que je trouve bien pratique mais à laquelle je trouve beaucoup de limites.

1- L'IA générative voleuse

Il est vrai d'affirmer que l'IA générative utilise les oeuvres d'art existantes pour créer ses propres représentations. 

En effet, et quel que soit le domaine (image ou son) le travail de l'IA a d'abord consisté à analyser des données notamment à l'aide des réseaux  de neurone convolutifs (Convolutional Neural Network, CNN). Cette pratique ancienne (années 80-90) a donné des résultats spectaculaires. Notons au passage que l'on attribut cette invention à un français devenu depuis une référence dans le domaine : Yan Lecun. C'est par exemple cette technologie qui a permis la lecture automatique des codes postaux sur les enveloppes postales.

L'idée est ensuite venue d'inverser ces réseaux de neurones pour en faire des générateurs d'image (ou de son). Ces générateurs, guidés dans leur travail par les CNN précédemment vus, sont appelés Generative Adversarial Networks (GAN). Le principe en est assez simple en apparence. Si on caricature le processus, on peut le résumer aux étapes suivantes : d'une part, on entraine un CNN à reconnaître les caractéristiques d'un objet, d'autre part on prend un autre CNN que l'on "retourne" et on l'entraine à créer des images à partir de caractéristiques. Le premier servant à corriger le second tant que le résultat n'est pas satisfaisant.

Donc, effectivement, initialement, il y a bien le travail d'un artiste humain qui a été décortiquer par une IA qui est dorénavant capable de faire des représentations dans le même style. La preuve en est qu'il est facile de lui demander de créer "dans le style de".

Voici une série d'exemples générés avec Bing Copilote. Je lui ai demandé de dessiner des dragons "dans le style de" :

Larry Elmore:

Clyde Cadwell :

 Hans Rudi Giger :

 Enki Bilal

 

Miyazaki :

Uderzo :


 Le résultat est plutôt crédible, certains diront effrayant, mais si on y regarde de plus près on remarque tout de suite plusieurs défauts. En premier lieux, on trouve facilement des aberrations dans le dessins. Parmi les plus courants, on note le nombre incorrect (ou asymétrique) de doigts. Ensuite, on note rapidement que tous les dragons ont exactement la même pose : redressés, gueule ouverte et une patte levée.

Donc, oui, l'IA utilise des oeuvres existantes et elle est capable d’imiter un artiste.

Un usage peu scrupuleux pourrait facilement verser dans de la contrefaçon.

Maintenant, quelle est la frontière entre un artiste qui s'inspire du travail de ses prédécesseurs (en particulier lors de sa phase d'apprentissage) et l'IA qui reprend des éléments d’œuvres existantes ?

2- Un outil bien pratique mais qui a ses limites

 Pour quelqu'un qui souhaite illustrer ses publications sans avoir ni le talent ni le budget pour rémunérer un artiste, il faut bien admettre que l'IA générative est un formidable outil. Comment illustrer un paysage ou un personnage autrement quand on a aucun talent en dessin ? Alors qu'en saisissant ses idées dans l'interface on parvient rapidement à un résultat satisfaisant.

Cependant, comme on l'a vu au précédent chapitre, l'IA a ses limites. Certaines erreurs flagrantes demeurent, comme par exemple, la plus célèbre, le nombre de doigts de la main. Et le résultat est encore pire pour des concepts plus complexes comme des créatures tentaculaires. Je n'ai ainsi jamais réussi à obtenir un Beholder satisfaisant malgré la quantité de ressources disponibles en ligne.

Voici par exemple le mieux que j'ai pu générer lors de la rédaction de cet article : 


 En outre le résultat général, bien que généralement esthétique, reste très terne et sans âme. On trouve quelques explication à cela, comme le fait que les visages soient dessinés symétriques. De plus, au fil des usages, on finit par se rendre compte que les créations convergent vers les mêmes archétypes et se ressemblent un peu toutes.

D'une façon générale, on reste tout de même très loin du travail d'un artiste réel avec ses émotions et ses défauts qui rendent le résultat plus réaliste.

Autant c'est un formidable outil pour illustrer du travail d'amateur, autant on ne peut s'en satisfaire pour un usage professionnel.

3- Des mésusages de l'IA générative

Comme on l'a abordé plus haut, il y a au moins deux usages de l'IA qui sont problématiques : contrefaire le style d'un artiste pour vendre des images en son nom et remplacer le travail d'un artiste réel par une IA dans un cadre professionnel. Et je profite d'un exemple récent pour illustrer ce dernier point.

Sur les réseaux sociaux a circulé dernièrement une publicité pour un évènement musical dont l'affiche qui avait clairement été faite par IA comportait de grossières erreurs. Un regard attentif permet tout de suite de repérer les erreurs flagrantes :


 Enfin, et c'est peut être le pire, il en est suffisamment stupides pour publier des images générées par IA mais tenter de faire croire qu'il s'agit d'un travail authentique. Voici une capture d'écran qui parle d'elle-même :


En conclusion, si je devais donner mon avis sur l'IA, je dirais que c'est un outil puissant et pratique mais qui ne remplace pas l'authenticité d'un artiste et qui doit être utilisé de façon éthique.

N'hésitez pas à venir en débattre dans les commentaires.

Merci de votre lecture.


 



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